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mardi 4 décembre 2012

LE NAUFRAGE



De larges mâts brisés roulent dans l’écume des flots,
Une brise matinale couve une coque échouée ;
La tempête fait rage, ravage le navire coulé :
Une brume épaisse recouvre cet enivrant îlot.


Des traces de pas apparaissent sur le sable,
L’océan de ses puissantes ondes les remplace.
Engloutissant tout sur son passage inlassable,
Son amertume rampante y prend place.


Éternel naufragé ! Enfant de la mer !
Tu vogues par ses vagues berçantes loin de ta terre…
Personne pour ton deuil perçant sur ton seuil amer !
Solitaire, tu as mis les voiles : la vie t’atterre.


Un ciel boréal voile le soleil endormi
Et râle en soufflant les dernières étoiles ;
Telle de la craie défilant sur la toile,
L’aurore en pastel réveille un nid de fourmi.


Quel est ton nom ?
Quand les tonneaux
Comme de lourds boulets de canons
Déboulèrent en allure sur l’eau,
Comment as-tu tenu
Sans bouger, demi-nu ?


Te voilà étendu… Entends-tu la musique
A ton oreille, des coquillages et leurs secrets ?
Mystère des profondeurs et des merveilles sacrées !
Celles des coraux, caravelles et cavernes antiques.


Rêves-tu de ta dérive ou aux trésors perdus ?
La perte sur l’île, ton sort comment l’a-t’elle rendu ?
Des mouettes s’entrecroisent au-dessus des arbres,
Leurs ombres croissent. Tout se fige comme du marbre.
Le soir est tombé tel un rideau au théâtre.
Tu gis inanimé comme un pantin en plâtre…
Éveillé mais envahi, rongé par tes songes,
L’envie de manger mais tu loues Dieu et Ses anges.
La vie écrase la mort faisant taire les mensonges,
Le croassement des corbeaux erre au chant des mésanges.

Cette île regorge de fruits sublimes,
Leurs arômes recèlent un goût subtil.
Un nectar ruisselle d’une des limes,
Un délice indicible s’en distille.


Le désir assouvit, le sommeil t’assoupit.
L’imposant crépuscule de la nuit s’accroupit.
Le radieux soleil circule car la lune le suit,
A l’inverse de la pluie timorée qui le fuit.


Ta pupille se dilate et ta rétine s’étire,
Ton souffle se ralentie et tes yeux s’écarquillent
Envoûtés comme par l’étrange spirale d’une coquille.
Des tisons allumés dans une forêt t’attirent.


Au loin s’agitent des ombres reflétées par des torches,
Il s’agit d’hommes, leurs silhouettes s’élancent.
Des pas et hurlements percent le silence.
Pars Naufragé ! De peur que leurs lances ne t’écorchent.

Des cannibales !
Un instinct animal
Respire fort en ces Hommes
Qui les inspire au mal,
Et aspire à être comme
Le diable, L’infâme,
Inaudibles sont leurs âmes !

La ruée vers l’horreur est engagée !
La terreur, des rugissements enragés !
Un orage torrentueux surgit semant l’impasse :
Certains glissent, les chemins tortueux les enlacent.


Naufragé, n’aie crainte ! Tes prières te viennent en aide.
Vois l’horizon ! L’eau résonne l’appel des marins.
Leur phare éclaircit l’ombre comme le jour les matins.
La Lumière guide ! Cours ! En ta faveur le Ciel plaide.

Sophie OKUNHON

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